Ainsi je fredonnais cet air, enfant, de la fermière qui s’en allait au marché, des pommes dans son panier !
Je trouvais cela bizarre mais comprenais qu’elle se donnait ainsi, un rythme qui l’enchantait, pour mener à bien sa mission. J’y entends, aujourd’hui, toute sa détermination à vivre.
Je ne peux m’empêcher de regarder ces allers-retours cahin-caha de l’école inclusive, comme ces pommes qui valsent dans le panier. Nous pourrions cependant oublier qu’au final, notre belle fermière avance !
Quel air faut-il aujourd’hui fredonner pour résister au gris de la morosité et du sentiment d’impuissance qui peut nous saisir, au rouge de la colère, au noir des situations qui semblent sans issue ?
Si la musique adoucit les mœurs, peut-elle endiguer certaines logiques mortifères qui se développent ? Telles que celle de la judiciarisation ; telle que celle du moi d’abord en oubliant la nécessité du bien commun ; telle que celle de la technocratie bureaucratique ?
Si la musique peut donner de l’allant et du rythme, peut-elle alors nous aider à trouver notre tempo dans ce développement de l’école inclusive dans une société inclusive ? Nous guider dans une marche enthousiaste, mais non forcée ?
Si la musique vient nous toucher au plus profond, peut-elle nous rassurer sur tout ce que nous faisons de bien ? Peut-elle nous inciter à encourager ce qui existe ? Peut-elle nous souffler les mots de l’apaisement, de la confiance véritable en l’humain : l’enfant, l’enseignant, les parents, les collègues ?
Si la musique nécessite un orchestre où chacun joue sa partition, peut-elle nous apprendre la rigueur des règles du vivre ensemble et l’enthousiasme de participer à une création unique et commune chaque jour, en chaque école ?
Combien de répétitions sont nécessaires, pour mieux s’accorder, préciser, expliciter ? Combien de pas avons-nous fait, faisons-nous, ferons-nous encore ? Et nous nous devons de poursuivre, tel cet orchestre où chacun a sa place unique et nécessaire, pour dire notre détermination à changer l’école… qui n’aura plus besoin alors de se nommer inclusive.
Car la norme ne l’enfermera plus, le vivre et apprendre ensemble permettront à chacun d’exister pleinement.
Véronique Poutoux, rédactrice en chef, novembre 2019.